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Le Blaireau-Garou
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16 janvier 2009

Jour d'été dans l'Obersalzberg

Le passage de la frontière en dit long sur les relations austro-allemandes: habituellement la douane est maintenue et on y poste un planton pré-retraité le nez dans sa paperasse qui ne lève pas les yeux quand un zozo passe à 80 au lieu de 10; eh bien nos amis ont maintenu la douane et ont dévié la route 50m à côté de façon à avoir une belle ligne droite sur laquelle ils roulent allègrement à 120 (on a la foi dans cette région). Mais j'ai plutôt intérêt à me concentrer si je ne veux pas louper la route de droite.

Je suis anxieux d'arriver à destination, dans un lieu marqué par l'Histoire et les malédictions qu'elle jette sur les Hommes (je sais je débloque, c'est l'émotion) . Le brouillard s'est mis de la partie, comme pour prévenir les inconscients que là-bas aucun trésor de quelque nature ne se cache, juste la mort dispensée par quelque odieuse créature assoiffée de sang, d'esprits et d'âmes de misérables humains orgueilleux. C'est que moi, je passe juste dans la région, je me suis déjà tapé les chutes de Krimml, Kitzbühl, la route du Grand Clocher jusqu'à Heiligenblut (je me souviens même que c'était jour de foire et que devant le magasin de souvenirs religieux les T-shirts à l'effigie de Battista et Triple H jouxtaient les statuettes du petit charpentier...) , je me suis coltiné la clique de touristes japonais et de petits singes français à Innsbrück, alors si je viens ici c'est parce que c'est pas loin de ma "pension" et que j'ai envie de respirer l'air pur des montagnes avant celui complètement cradingue de Salzbourg. Bon eh puis j'avoue: il y a un peu l'effet "grand méchant" aussi. Si on pouvait donc éviter la damnation aujourd'hui, ça ne serait pas sans me faire plaisir.

Pour le moment je suis à la fois rassuré et déçu: la route qui mène à Berchtesgaden n'est pas une série d'épingles à cheveux montant avec un angle toujours plus important et une largeur sans cesse diminuant vers un obscur cul-de-sac coupé du monde et ce genre de chose. De ce que le brouillard laisse apparaître, c'est tout vert comme dans les plaines de Franconie. Pas vraiment un décor montagnard, la Vallée de l'Ubaye bien de chez nous vaut largement plus le détour.

Arrivée à Berchtesgaden par la partie basse de la ville. Certaines des premières constructions sont si moches que je crois être arrivé à Stalingrad-du-Pays-Haut Longwy. Voiture parquée face au cimetière central. Deux choses frappent dès lors le regard de votre serviteur; la première, c'est cette énorme pierre tombale blanche entourée de lierre, portant le nom de "Dietrich Eckart" , se détachant nettement au premier plan des croix de bois à toiture qui constituent le gros de l'espace; le mentor d'Hitler n'a donc pas rejoint son disciple dispersé entre les archives du KGB et les égoûts de Magdebourg (qui en est déjà un sacré, d'égoût). La deuxième, c'est cette foule de touristes qui s'agglutine vers les guides proposant un départ pour le Nid d'Aigle, cet observatoire plus haut situé qui faisait office de deuxième bar au moustachu. Mon lecteur trépignant de contentement et déjà prêt à vanner les Allemands sur leur barbarie congénitale sera sans doute vexé d'apprendre qu'à part les guides ce groupe était composé quasi-exclusivement d'Anglo-Saxons et quelques Français. Ils viennent pour voir, pour juger, pour comprendre, qu'y disent. Effectivement, ils jugeront plus tard -ils sont forts pour donner des leçons les Ricains- mais pour l'heure les voilà béats d'admiration comme les gosses dans les pubs pour Kinder. En fait les choses sont simples: ici les habitants paient leur abonnement au golf sur le dos d'ignares touristes français et américains pour la plupart; c'est vraiment à se demander qui a gagné la guerre.

Pas de Nid d'Aigle et pas de Berghof non plus, donc. Marre de voir la bande d'obèses gouaillants dont j'ai appris qu'à part Salzbourg -pour Mozart, ils ne verront que des souvenirs de cet acabit. Le lundi pleurnicher à Mauthausen, le mardi ici, le mercredi chialer le matin à Dachau et boire une bière dans une célébrissime brasserie munichoise l'après-midi.... Pour moi ce sera visite de cette sympathique bourgade, de la basilique qui abrite les restes de je ne sais plus quels empereurs, de la grand-place et de son monument aux morts. "A nos héros morts pour la patrie" ou un truc dans le genre, posé tel un pied de nez aux vainqueurs et à leurs petits procureurs de descendants sur le fronton de la mairie, en précisant SVP: "1939-1945" . Ils me plaisent, ces gens qui ne renient pas ceux qui sont tombés pour eux, qui ont laissé les plaques commémoratives des enfants du pays morts dans les premiers uniformes camouflés.... Je suis fasciste, moi? Pas vraiment: mon honneur s'appelle loyauté et non fidélité, et j'en réponds devant ma conscience et non devant un chef d'Etat. Mais je persiste à croire que nous leur devons de ne pas être tombés sous le joug des Soviétiques, qui ont plus la sympathie du public parce qu'ils ne sont pas des "boches", mais dont on oublie que partout où leur vague est passée, elle n'a laissé que misère, laideur, triomphe de pique-assiettes incultes et systèmes politico-policiers iniques.

Il est temps pour moi de partir: le bon air de la montagne -et du brouillard- m'ont bien revigoré. Chez un marchand de souvenirs j'ai acheté une carte humoristique d'un goût bien à moi: une photo de banquet, trois femmes mondaines levant un verre rempli de vin pétillant, et un homme en costume noir à noeud-papillon, au visage flouté probablement par un brusque mouvement de sa part, et dont les traits évoquent ......  En-dessous on peut lire: "Tout de même, il y a une vie avant la mort!"

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Commentaires
U
Le patelin est très accueillant en tout cas :)
P
J'ai oublié le ;-)
P
Vous faites de bien beau voyage.
Le Blaireau-Garou
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