Enculés!

8 août 2009

Nancy, rue Saint Jean, vers 16h00 ce Vendredi 7 Aout 2009

Ils ont été attirés par le choc tonitruant, ils se sont massés comme des larves devant le beau spectacle qu'offre notre tramway-cocorico-municipal avec une C4 encastrée sur son flanc avant droit. Etait-ce pour défoncer les vitres du machin si la voiture avait pris feu? Pensez-vous, ces mesdames messieurs étaient attirés par la vue du sang... Du sang, il semble y en avoir eu, si l'on en croit le fourgon-ambulance des sapeurs qui, bien que fermé, ne se met pas en route vers l'Hôpital Central, mais de flammes et de brûlés vifs, point. "Merde, on va devoir se contenter d'un jour de shopping ordinaire", semblent se dire ces boeufs.

Virulent, moi? Attendez: une bagnole encastrée dans un tram, ça impressionne toujours plus que la peinture bricomarché de Buren, mais ce n'est pas une oeuvre d'art bien admirable non plus. Que sont-ils venus voir, les morts? Y en a pas. L'agonie du type dans le fourgon? comme si les pompiers étaient assez cérémonieux pour nous annoncer la mort du pauvre hère. Les flics? Ne les voit-on pas assez habituellement, ceux-là? Non, ils suivent toute l'affaire dans l'espoir de pouvoir dire un jour à la presse ou aux poulets: "Je sais tout, j'ai tout vu, j'y étais, c'est lui qui..."; le comité du salut public a laissé des traces dans nos esprits, à nous franchouilles de souche ou de branches contemplant ce spectacle de rue imprévu et somme toute amusant en regard de nos petites existentes tranquilles et casanières de merde.

Souvenir de ce grand jour inhabituel, la traditionnelle photo que chacun prend, telle pauvre descendante d'esclave avec son son appareil photo dernier cri (98% des fonctionnalités inutiles), tel Paul-Michel de la rue Isabey en short sur son VTT avec son téléphone (itou); ça lui évitera peut-être pour aujourd'hui de refuser la priorité à une poussette. Oh que c'est joli, qu'est-ce qu'on se marre, qu'on prie pour le pauv'type dans l'ambulance tout en racontant bien haut la dernière panne de son mec au pieu, et en reprenant encore une photo pour le plaisir car de toute façon on peut encore en stocker deux millions.

Vingt secondes à étudier le comportement des mouches à merde à taille humaine ont suffi, je ne souhaite pas concurrencer Konrad Lorenz à son propre jeu. Me frayant un passage dans le tas de badauds amorphes, je demande bien audiblement à "Paul-Michel" s'il n'a que cela à foutre... lui a compris le ridicule du comportement voyeur qui a été le sien l'instant précédent; il baisse les yeux et part loin de la scène. D'autres me font la moue; si c'est pour me faire comprendre que je suis "un blaireau", je le savais déjà.

Toujours à occupés à prendre et reprendre la même photo, à la contempler sur leur écran LCD quand la scène du drame se déroule sous vos yeux, tel ce surveillant lors de la bataille finale du film Brazil. Les voir tripoter compulsivement leurs beaux joujous en toute bonne conscience, comme devant un théatre de marionnetes, m'amène à penser que "Putains de pick-pockets, jamais là quand on a besoin d'eux!"

Posté par unfan à 02:15 - Commentaires […] - Permalien [#]