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Le Blaireau-Garou
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30 janvier 2009

Assumer

Qu'il est dur, certains jours, de se rappeler que l'on est définitivement séparé d'une personne que l'on se souvient avoir jadis tant appréciée, avec la conviction que c'était en grande partie à juste titre. La discorde est venue d'une simple négligence, celle dont on ne se serait nullement choqué de la part d'une nature vulgaire -tant celles-ci agissent de façon prévisible- mais qui révolte, qui écoeure, qui allume les feux de la colère quand elle est le fait de quelqu'un qu'on a jugé digne de faire partie des siens. Sont venus les reproches irascibles, les malédictions sans appel, puis les menaces exprimées en serrant les poings, prêts à en venir aux mains, et l'interposition d'un groupe donnant quasi-unanimement raison à l'adversaire. Quand au final on a bien montré qu'on était le plus déterminé à faire payer à l'ennemi sa trahison, qu'on a fini par lui montrer qu'il s'agissait d'autre chose que d'une joute verbale avec exposition de crocs, qu'il a fallu faire respecter l'ordre par ses professionnels.... on souhaiterait être resté couché avec gastro et grippe ce jour-là; on sait que l'incident n'aurait pas pris tant d'ampleur dans des circonstances plus sereines (car elles ne pouvaient l'être moins), on ne s'en veut pas moins, même si l'on sait se mentir et que l'on ment aux autres avec l'espoir qu'il parviendra aux oreilles de l'intéressé que "Je ne regrette rien!".

On s'est recroisés depuis, sans s'adresser chacun autre chose que son regard le plus noir, l'autre le détournant le premier avec un petit air de mépris qui dissimule mal une crainte palpable. Les besoins d'une profession commune font que l'on s'est reparlés par téléphone, sans s'être soi-même présenté mais avec l'intuition qu'au bout du fil le vouvoiement et l'élocution soignée ont autant éveillé les soupçons que constitué un masque.

Le pire, dans ce genre d'histoire, arrive lorsqu'une personne qui a bénéficié des services de l'autre... en vient à tellement apprécier les nôtres qu'il nous compare à lui en termes de dévouement et de gentillesse. Une vague réminiscence nous fait acquiescer que l'ex-ami a objectivement beaucoup de qualités certaines. Et alors survient l'inexorable: d'un seul coup se craquèle le plâtre qu'on avait tant bien que mal étalé sur le trou béant de cette blessure de l'âme, et c'est lui qui en ressort avec toutes les qualités qu'on lui connaissait et lui reconnaissait quand la haine n'avait pas encore tout emporté, et qu'on se surprend si subitement à lui reconnaître de nouveau. Pour un peu, on lui donnerait presque raison dans le différend qui nous oppose, tant la colère noire depuis si longtemps lancinante bondit au-devant de notre coeur pour redevenir l'amour qu'elle avait été autrefois, mais que l'on ne pourra certainement plus jamais déclarer à l'être aimé. Au chagrin d'avoir commis l'irréparable se joint la sérénité, déjà éprouvée au moment de décider qu'on emploierait les moyens les plus radicaux pour échapper à l'inique justice des hommes (aka la vengeance "sociale") -qui n'a heureusement pas voulu sévir "pour cette fois". Mais il n'est pas question ici de mourir pour éviter le déshonneur aux nôtres; il est question d'honorer la mémoire d'une amitié qu'on a soi-même assassinée. A défaut de pouvoir la ressusciter, n'a-t-on pas le devoir de chanter comme elle fut belle?

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Commentaires
I
Etre capable de supporter l'hostilité et une certaine solitude. C'est à ça que se reconnaissent les natures supérieures...<br /> Sinon, se fritter un peu entre hommes ca arrange bien les choses... ca remet les choses à leur place... et relativise les conneries... mais c'est dur de trouver à se fritter avec des potes... très dur!
Le Blaireau-Garou
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